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Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791)

Aucun musicien n’a été, autant que Mozart, victime d’incompréhensions et de contresens. Si les "grands" du XIXe siècle, Beethoven, Schubert, Schumann, Chopin et Wagner, surent reconnaître ce qu’ils devaient à leur devancier, le public romantique, un Berlioz en tête, ne voulut voir en Mozart que l’ordonnateur frivole des festivités galantes et désuètes de l’Ancien Régime musical. On ne retrouvait pas en lui le titanisme prométhéen dont s’enivrèrent les générations postérieures aux bouleversements initiaux du siècle. Pourtant, à partir du premier centenaire (1856), une certaine faveur lui revint, mais ce fut pour la pire des raisons.

On fit de lui, pour l’opposer aux hardiesses alors scandaleuses des novateurs, le parangon d’un académisme fade et béat : sa musique était présentée comme le point culminant de la perfection, au-delà duquel il ne pouvait y avoir que décadence. Ainsi s ’instaura la légende, si difficile à extirper, de l’enfant prodige au profil de bonbonnière, de l ’artiste recevant miraculeusement du Ciel ses mélodies suaves.

Il fallut attendre le début du XXe siècle pour que fussent révélés les aspects sombres et inquiétants, "démoniques" de son oeuvre (Alfred Heuss, 1906). Puis, grâce aux admirables travaux de grands musicologues, in primis Georges de Saint-Foix (1912), Hermann Albert (1919) et Alfred Einstein (1945), le vrai visage de Mozart fut peu à peu retrouvé ; l’auditeur put enfin embrasser la totalité mozartienne et découvrir la déroutante variété des aspects de son oeuvre. De plus, en dénonçant le mythe de la facilité et de l’inspiration, l’historien restitua au Maître sa qualité de travailleur acharné et de technicien accompli, scientifique, de l’art musical.

Aussi sommes-nous maintenant à même de le situer musicologiquement à sa juste place : place véritablement centrale, tant pour le site que pour l’heure. Car il s’épanouit et mûrit à tous les climats musicaux de l’Europe de la fin du XVIIIe siècle : l’Allemagne du Sud et du Nord, l’Italie, la France, de sorte qu’il put se rendre maître de tous les langages qui étaient alors en faveur ou en gestation. Mais son intérêt pour la technique musicale était si vif qu’il ne se contenta point de cela : il remonta le cours du temps, cherchant à capter les formes du passé qui pouvaient encore lui être accessibles.

Ce fut donc un gigantesque travail de synthèse qu’il s’astreignit à réaliser, englobant à la fois tous les langages contemporains et antérieurs, et anticipant hardiment sur les recherches les plus audacieuses des compositeurs à venir.

Mais là n’est pas le plus important. L’actuel "retour à Mozart" n’est pas simplement de l’ordre artistique. Si Mozart aujourd’hui nous va si droit au coeur, c’est que nous découvrons en son oeuvre, non pas en dépit, mais en fonction directe de sa limpidité, une grande profondeur de pensée. Et cette pensée ne porte pas seulement sur l’inanité des passions, l’amour et la fraternité humaine, mais elle s’attache surtout à des problèmes que, certes, l’on s’est posés de tout temps, mais que nous soulevons aujourd’hui d’une manière plus instante que jamais : qu’est-ce que la mort ? quel est le sens de la vie ?

De la réponse à ces questions dépendait pour lui la paix, la sérénité à quoi il aspira foncièrement depuis l’enfance. Mais son aspiration, toujours insatisfaite, le fit passer par des crises d’inquiétude et d’angoisse alternant avec des moments de paisible luminosité. Ces alternances, à mesure qu’il approchait de la mort, précipitèrent et s’aggravèrent. Aussi est-il fort impressionnant de voir un musicien, dont les oeuvres tant de fois ont respiré le bonheur, manifester aussi, d’une manière si désolée, l’angoisse foncière qui ne le quittait pas. Car, après la luminosité de La "Flûte Enchantée" et de sa dernière Cantate maçonnique (K623), nous assistons au tragique effondrement qu’exprime son Requiem interrompu. Il fut acculé, à l’heure de la mort, au désarroi, à la désespérance, faute de la clef intellectuelle que, grâce à Paul de Séligny, nous avons aujourd’hui à notre disposition pour résoudre ces problèmes fondamentaux :

Puis, inexorable, vient le jour où sonne pour toi
l’heure de te retirer de cette scène,
et tu t’en vas les mains vides,
vides de l’essentiel, (...)
Faute d’un enseignement adéquat,
faute donc de savoir ce qu’il en est de toi-même
en vérité,
tu t’en vas
toujours captif de ta méprise,
toujours enlisé dans ta confusion,
toujours plongé dans la dualité,
tu poursuis ta course folle,
tu poursuis ton errance.

Les étapes de la vie musicale de Mozart
La vie privée de Mozart ne présente guère d’intérêt pour qui veut comprendre sa musique. Elle se réduit d’ailleurs à peu de chose : né à Salzbourg, il reste au service de la cour archiépiscopale de sa ville natale, jusqu’au moment où il se brouille violemment avec l’archevêque Colloredo, en mai 1781 ; il se fixe alors à Vienne. Contre le gré de son père, il épouse Constanze Weber (1782). Le succès qu’il escompte lui échappe de plus en plus ; il tombe dans la pire misère et meurt à Vienne dans une indifférence quasi générale. Seul Joseph Haydn, apprenant à Londres la mort de son jeune ami, passera la nuit de Noël à le pleurer.
Les seuls événements marquants de sa vie sont ceux qui jalonnent les étapes de son évolution musicale.

L’enfance (1756-1778)

Dès l’âge de trois ans, Wolfgang manifeste, outre une puissance exceptionnelle de concentration, des dons musicaux remarquables : justesse absolue d’oreille et mémoire prodigieuse. Son père, Léopold (1719-1787), sévère mais excellent pédagogue musical, entreprend son instruction. On lui a reproché d’avoir exercé sur son fils une influence conservatrice et retardatrice ; mais Wolfgang sut faire la part de l’étroitesse d’esprit et celle de la solidité du métier : jusqu’à la mort de son père, il se référa toujours avec une totale confiance à son jugement.
Leopold entreprend, avec son fils et sa fille Maria Anna, des tournées où il exhibe l’enfant prodige, au risque d’exposer Wolfgang, entre sa septième et sa onzième année, aux fatigues et aux maladies de voyages lointains. Ces expéditions se retournent d’ailleurs partiellement contre le père, car l’enfant y trouve l’occasion de capter des influences qui n’agréent pas à son mentor et qu’il n’aurait pas connues si tôt s’il était demeuré à Salzbourg.

Une première tournée (1762) mène le bambin à Munich et à la cour impériale de Vienne. Mais c’est la deuxième qui est la plus importante : elle dure trois ans (1763-1766) et les fait passer l’Allemagne occidentale, Mannheim, Francfort (où il fait l’ admiration de Goethe), Bruxelles, paris (où il joue devant la Cour), Londres. La Haye, Amsterdam, Lyon, Genève. Voyage capital pour la suite, parce que, dés l’âge de huit ans, Mozart fait la découverte de deux musiciens qui le marqueront pour toujours : Johann Schobert (1735 env. 1767) à Paris, Jean-Chétien Bach (1735-1782) à Londres. Grâce au premier s’éveillent à la fois en lui le sens de la tendresse mêlée à l’intensité pathétique et celui de la poésie musicale. Par le second (fils cadet de Jean-Sébastien), c’est paradoxalement en allant vers le Nord qu’il entre en contact avec la chaleur ensoleillée du Midi italien.

De retour dans son Autriche natale, il s’imprègne de l’esprit musical, à la fois sérieux et gemütlich de l’Allemagne du Sud, représenté par Joseph Haydn, son aîné de vingt-quatre ans, qu’il découvre lors de quelques séjours à Vienne.
Il lui fallait dorer sa palette musicale au soleil du Midi, et c’est un point à mettre à l’actif de son père que de l’avoir envoyé à trois reprises en Italie : 1769-1770, 1771, 1772-1773. Pendant cette période, il se plonge, alternativement, dans la musicalité chantante mais superficielle de l’opéra italien d’alors et dans la sensibilité autrichienne. Ce qu’il retire de plus précieux de ce contact avec l’Italie, c’est, grâce au padre Martini qui le fait travailler à Bologne (1770), l’art de la mélodicité polyphonique puisé à la tradition des anciens maîtres du contrepoint chantant. Jusqu’au terme de sa carrière, Mozart restera dès lors un maître incontesté, surtout dans les ensembles d’opéras, de la science de la polyphonie vocale.

Il résulte de son dernier voyage en Italie une crise "romantique" où Mozart, alors âgé de dix-sept ans, produit de purs chefs-d’oeuvre : les quatuors milanais (à cordes), K.155 à 160, et la trilogie symphonique de l’hiver 1773, K 200, 183 et 201, qui consacrent la synthèse du Nord et du Midi.
Ensuite, pendant quatre ans, il s’adonne à la "galanterie" musicale. On désigne par là une forme musicale bâtarde, intermédiaire entre la puissante structure baroque qui est abandonnée et le nouveau langage thématique qui s’élabore (surtout grâce à Joseph Haydn) ; la galanterie tire son agrément de l’enrubannement rococo de mélodies flottant sur un accompagnement d’accords rompus. Beaucoup ont reproché à Mozart de s’être laissé aller à la facilité en adoptant ce style décoratif pour complaire à l’aristocratie salzbourgeoise : sérénades, divertissements, sonates salonnières pour le piano. Pourtant, ces années de détente lui ont permis de développer le sens de la poésie musicale. Celle-ci affleure déjà les concertos pour violon (1775), et surtout elle fleurit à pleines corolles dans la merveilleuse année 1776, celle où le maître a vingt ans. Si de telles oeuvres faisaient défaut, il manquerait quelque chose d’important dans l’oeuvre mozartien.

Et c’est l’année suivante (1777) qu’il réalisera soudain son premier chef d’oeuvre dans la lignée des grands concertos pour le piano, le bouleversant K 271 en mi bémol majeur.
De septembre 1777 à janvier 1779, c’est le grand voyage à Paris. Il part, accompagné seulement de sa mère, et l’aventure sera très décevante sur le plan du sentiment (son amour déçu pour Aloisia Weber), de la famille (sa mère meurt à Paris) et de sa carrière (il est évincé des milieux musicaux de la capitale et lâché par le baron Grimm, son protecteur). Par contre, sur le plan musical, ce voyage sera très fructueux : à l’aller, il s’arrête longuement à Mannheim où il découvre les puissances expressives de l’orchestration romantique moderne. A Paris, lui qui depuis toujours est hanté par le désir d’écrire des opéras, il tombe en plein dans la lutte entre piccinistes et gluckistes ; mais il ne s’y engage pas parce qu’il prend déjà conscience du style de théâtre musical qui sera le sien. Par-dessus tout, ce séjour à Paris aura une importance capitale du fait que Mozart capte l’esprit français, sans en retenir la sécheresse, le goût de la pudeur, l’ élégance et de la concision. Il aura dès lors plus que jamais horreur de la longueur et de l’emphase oratoire (ce qu’il appelle le "goût long des Allemands".

A présent, son assise est bien solide, tripartite ; il devient le musicien européen pat excellence, capable de réaliser la Synthèse des langages allemand, italien et français, dont il peut user, comme en se jouant, en y mettant sa propre touche.

La Maturité (1779-1788)

Pendant trois ans, il pose les bases de son évolution future : concertos pour le piano, sonates pour violon et piano, sérénades qui font craquer les limites galantes du genre. Tout cela aboutit à un chef-d’oeuvre dramatique qui, en dépit de la forme désuète de l’opéra séria, offre les prémices de tout son art lyrique et symphonique : l’Idoménée (Munich, 29 janvier 1781). En mai, il rompt, après des scènes affligeantes, avec son employeur, l’archevêque Colloredo, et s’installe, sans ressources et sans situation, à Vienne. Son père désapprouve cette rébellion et prend plus mal encore les fiançailles de Wolfgang avec Constanze Weber, qu’il estime indigne de lui. Mozart passera outre et l’épousera le 3 août 1782…

Un problème se pose alors au Maître : comment gagner la plus vaste audience possible, car la vie même du jeune ménage en dépend, non seulement en s’interdisant toute concession à la facilité, mais encore en mettant tout en oeuvre pour hausser le public superficiel de Vienne à des hauteurs inaccoutumés ? Mozart a enfin l’occasion d’écrire, pour la scène, un opéra qui ressortit à un genre où il libre, le Singspiel, et où il ne subit plus les lourdes contraintes de l’opéra seria. L’Enlèvement au sérail, opérette allemande, inaugure, le 16 juillet 1782, la série de ses chefs-d’oeuvre lyriques.

A partir de 1782, Mozart passe par des crises successives qui deviendront de plus en plus graves à mesure qu’il approche de la mort. Ces périodes où l’ethos se fait angoissé et, par moments, tragique (1783, 1785, 1787, 1790), alternent avec de merveilleuses accalmies (1784, 1786, 1788, 1791).
Aucun événement de sa vie privée ne saurait expliquer ces "strangulations". Elles se comprennent, mais en partie seulement, par des problèmes de technique musicale : la rencontre de nouvelles formes d’écriture crée toujours chez lui une contraction de style qui ne peut se détendre que lorsque les nouveautés ont été complètement assimilées : et, par assimilation, on n’entend pas l’art d’adopter des procédés (ce qui pour lui était un jeu d’enfant), mais le fait d’en arriver à parler de ses langages à l’état naissant.

Certes, après son retour de Paris, tous les styles proprement contemporains lui étaient devenus familiers, et ce n’est pas une des choses les moins stupéfiantes qu’un musicien doué d’une telle mémoire ait pu rester foncièrement libre à l’égard de toute imitation. Pourtant, il lui restait encore deux langages à découvrir et à faire siens : l’un qui avait son assise dans le passé, l’autre qui s’ouvrait audacieusement sur l’avenir. Le premier est la puissante structure baroque de type fugal, représenté par Jean-Sébastien Bach ; le second, illustré par Joseph Haydn, surtout dans ses quatuors à cordes, est le style thématique du type sonate, avec ce qu’il implique de richesse harmonique, par l’extension tonale, et de construction dialectique orientée vers la forme cyclique. C’est en 1782 que Mozart découvre ces deux langages antinomiques qui sont d’ailleurs l ’un et l’autre peu compatibles avec la mélodicité à laquelle son travail de synthèse l’a fait parvenir.

C’est donc à un nouveau travail de synthèse l’a fait parvenir. C’est donc à un nouveau travail de synthèse qu’il va s’adonner durant ses deux premières années viennoises (1782-1783), synthèse d’autant plus vaste et difficile qu’elle doit englober tout ce qu’il a précédemment acquis. Ces découvertes, il les a faites à point nommé : tôt, puisqu’il n’a que vingt-six ans ; tard, puisqu’il n’a plus que neuf ans à vivre…
Mozart-Bach ! Conjonction historique impressionnante, d’autant plus qu’il fallait alors du courage, et presque de l’audace, pour remonter le cours du temps. En effet, Jean-Sébastien, mort en 1750, était trente ans plus tard, non seulement méconnu, mais inconnu. Ses partitions étaient introuvables, et c’est par hasard qu’un diplomate mélomane, le baron van Swieten, rapporta de la cour de Prusse des copies manuscrites de quelques fugues du grand Cantor.

Mozart prend feu, s’essaie à ce style périmé dont il est le seul alors à saisir la puissance. Et, en mai 1783, c’est la merveille, le chef-d’oeuvre de sa musique religieuse : la Grande Messe en ut mineur (inachevée) K 427. Pendant le même temps, il se concentre dans le travail ardu (comme il le déclare lui-même) de la composition thématique. Son coup d’essai est un coup de maître : en décembre 1782, le quatuor à cordes K 387 inaugure la glorieuse série des six quatuors (les trois derniers seront terminés en 1784-1785) qu’en hommage à Haydn il lui dédiera. Celui-ci, les écoutant, dira à Léopold présent à l’exécution : "Je vous déclare devant Dieu, en honnête homme, que je tiens votre fils pour le plus grand compositeur que je connaisse" (février 1785).

Ces travaux de recherche, c’est dans le retrait du laboratoire scientifique que Mozart les mène ; aussi voyons-nous, à partir de 1782, ses compositions se scinder en deux : les oeuvres de solitude, le plus souvent rétractées et même tragiques, et les oeuvres destinées aux concerts où il évite de choquer et de brusquer le grand public. Non qu’il fasse des concessions pour conquérir une audience dont il a tant besoin : au contraire, avec autant de sûreté de main que de prudence, il introduira peu à peu dans ses concertos et ses symphonies les découvertes audacieuses qu’il a faites dans la solitude. Cela lui coûtera d’ailleurs, à partir de 1786, la désaffection croissante du public viennois.

Le résultat de cette complexe élaboration se voit dans l’explosion magnifique des six concertos pour piano de 1784, chefs-d’oeuvre qui seront suivis de six autres jusqu’à la fin de 1786. Mais ce succès de 1784 est suivi d’une année sombre, la plus "romantique" de la vie du Maître (Concerto en ré mineur K 466, les trois derniers quatuors à Haydn). Notons qu’en décembre 1784 Mozart est initié à la franc-maçonnerie, et que les idées qu ’il brasse lui inspireront la dramatique Ode funèbre K 477 (novembre 1785).
1786 : une année claire comme l’avait été celle de ses vingt ans, mais avec, maintenant, une aisance qui est le signe qu’il a réalisé la synthèse de tous ses langages. Le style thématique en arrive à s’épanouir dans la mélodicité, comme on peut le voir dans sa musique de chambre avec piano (les trios), dans les trois beaux concertos pour le piano K 488, 491 et 503, et surtout dans Les Noces de Figaro. Mozart a trouvé le genre théâtral qui lui convient le mieux, l’opera buffa, où la richesse et l’intensité musicales vont de pair avec l’alacrité et la présence scéniques.

Nouvelle crise en 1787 : Mozart est gravement préoccupé par l’idée de la mort, surtout après le décès de son père. C’est l’année du Quintette en sol mineur K 516 et du Don Giovanni, où se pose à cru le problème de la rupture de l’ardeur de vivre et de l’inanité des passions.
L’année 1788 est dominée par le massif symphonique aux trois cimes : la Mi bémol K 543, la Sol mineur K 550 et l’ultime : la Jupiter (K 551, du 10 août), qui est le testament symphonique du Maître. Mais, le plus étonnant, c’est que Mozart fait voisiner avec ces pièces monumentales des oeuvres légères, presque galantes, comme la Sonate "facile" (K545) et les derniers trios.

Les dernières oeuvres (fin 1788-1791)

A partir de l’automne 1788, Mozart entre dans une période de retrait ; mais sa musique d’intimité (pour cordes ou piano solo) a le plus souvent un caractère de sérénité (Trio K 563, Sonate pour piano K 570). Au cours d’un voyage où il essaie d’obtenir la faveur du roi de Prusse, il fait un pélerinage à la Thomasschule de Leipzig, rendant un suprême hommage à Bach. Son écriture se resserre encore (Sonate pour piano K 575 et derniers quatuors) et s’épanouit dans la concentration poétique du Quintette avec clarinette K 581. Tout cela aboutit à l’oeuvre théâtrale la plus translucide de Mozart, le Cosi fan tutte, comédie-proverbe d’une profonde gravité sous son élégance frivole (Burgtheater, Vienne, 26 janvier 1790).
L’année 1790 est un véritable désert, aride et désespéré. Pourtant, en décembre, le magnifique Quintette à cordes en ré majeur K 593 marque un redressement total.

La poésie décantée de l’ultime année s’épanouit dans de vastes compositions (le dernier Concerto pour piano K 595, le Concerto pour clarinette K 622) et, d’une façon plus concentrée encore, dans les piécettes apparemment insignifiantes (lieds, adagio pour harmonica, cantiques maçonniques). Deux mois avant sa mort, le succès semble enfin se dessiner avec La Flûte enchantée, singspiel maçonnique où il récapitule pour la scène tous les langages de sa carrière.
Mais, en même temps qu’il achève cette oeuvre toute pénétrée de son aspiration à la lumière, il commence son Requiem. L’oeuvre ne sera pas terminée : Mozart meurt le 6 décembre. Son corps sera enterré dans la fosse commune.

La musique mozartienne

Mozart n’a créé aucun langage. Sa vie durant, il ne laissa pas d’être à l’affût de tous les idiomes dont il pouvait prendre connaissance, et, quand il les adoptait, loin d’en rester au formalisme des procédés, il les recréait de l’intérieur. Mozart n’a été le maître d’aucun langage : il a été maître de tous ses langages, jusqu’à les parler comme autant de langues maternelles, et c’est là la vraie maîtrise.

Et pourtant, il leur imprime la marque "mozartienne" qui les dépouille de tout particularisme national ou culturel. On ne peut cependant pas, à son propos, parler d’originalité : il n’a pas marqué son oeuvre du cachet de ce qu’on nomme la personnalité de l’artiste, ainsi que firent un Beethoven ou un Wagner. Il n’y a pas de style mozartien ; il n’y a pas, même dans ses opéras, de "monde", de climat mozartien. Et pourtant, sa musique a quelque chose d’unique, qui se décèle dès l’audition de quelques mesures, quelque chose d’insaisissable.
Et cela est constant en dépit de la versalité des ethos, lesquels changent, souvent, d’un moment à l’autre.

Innombrables, en effet, sont les aspects opposites de cette oeuvre protéiforme : légèreté badine et gravité pathétique, galanterie salonnière et romantisme farouche, distinction aristocratique et bonhomie (Gemütlichkeit), voire truculence populaire, tendresse alanguie ou rêveuse et âpreté, violence virant parfois à l’atroce. Musique si facile d’accès et en même temps si savante, avec des structures accessibles aux seuls connaisseurs. Faut-il privilégier tel ou tel de ces aspects pour y voir le vrai Mozart ? Et de quel droit ? Comme, longtemps, on avait insisté sur la grâce et la légèreté, on a, par réaction, souligné les aspects graves et tragiques. Mais, à suivre la ligne d’évolution de sa création musicale, on voit combien il est simpliste de dire qu’il ait tendu de la galanterie de cour à la "grande "musique : les oeuvres de la denière année récapitulent tous ses styles et rejoignent, question de métier mise à part, celles de l’enfance. Un chose, par contre, est patente : c’est que le marasme n’est pas un état où il se doit complu, et qu’il a eu horreur de toute confidence ostentatoire. Les moments les plus hauts de son oeuvre sont ceux où, dans une totale solitude, il cherche une issue de sérénité. Et, chose stupéfiante, cela arrive en plein concerto, en plein opéra.

Ce qui fait la profondeur de sa musique, disions-nous, c’est la pensée. Mais, entendons-nous bien : il n’avait aucun goût pour le maniement d’idées abstraites : sa correspondance serait fort décevante pour qui y chercherait des spéculations de philosophie, de politique, voire d’esthétique. C’est en musique qu’il pensait et qu’il parlait, et cela lui était possible en vertu, précisément, de sa maîtrise technique : rien ne s’interposait entre l’idée et la vibration ordonnée du tissu musical.

Or, les problèmes qui, très tôt, l’ont préoccupé sont ceux de la mort, de la survie, du sens de la vie : les seuls passages de ses lettres où il fait part de ses réflexions profondes touchent à cela, et dès que, dans un texte à mettre en musique, apparaît le mot de "mort", le ton s’aggrave immédiatement. "Toujours entre l’angoisse et la joie", écrit-il à son propre sujet. Mais comment venir à bout de cette dualité, source d’une continuelle instabilité, d’un continuel déséquilibre ? Par un sursaut héroïque, de type romantique, où l’on s’enivre de puissance en créant un monde fictif d’évasion ? Non ! Chez Mozart, c’est tout le contraire : c’est dans un langage clair, simple, aussi proche que possible (avec un métier consommé) du naturel qu’il cherche une issue. Sa musique n’emporte pas l’auditeur roulé passivement dans un flot d’harmonies ; elle requiert de lui lucidité et présence. Mais encore, pour dire quoi ? L’art n’est pas un but.

Mozart fut séduit, sans doute pour fortifier la foi de son enfance, par le symbolisme, qui se manifeste surtout à partir de 1784, il l’a maintes fois rompu, parce qu’il ne pouvait pas s’en satisfaire. Le triomphe idéologique de la Lumière sur l’Ombre, qu’est-ce d’autre, après tout, que l’option qu’il a refusée, à savoir l’évasion dans un monde fictif, le renoncement, et donc l’incomplétude ? Il semble avoir pressenti que la Lumière, la sérénité à quoi nous aspirons, ne saurait être une entité, un pôle, un au-delà. Et c’est sans doute à ce pressentiment, à cette impression de vide qui tient ce qui distingue sa musique de toutes celles qui revêtent une apparence de plénitude. "Je ne peux pas bien t’expliquer mon impression de vide que tient ce qui distingue sa musique de toutes celles qui revêtent une apparence de plénitude. "Je ne peux pas bien t’expliquer mon impression, écrit-il quatre mois avant sa mort (7 juillet 1791), c’est une espèce de vide qui me fait très mal, une certaine aspiration qui, n’étant jamais satisfaite, ne cesse jamais, dure toujours et croît de jour en jour. Même mon travail ne me charme plus."

La Flûte enchantée est terminée le 30 septembre ; il lui reste à écrire son Requiem, dont il sent qu’il le compose pour lui-même. Une panique eschatologique emporte tout et disloque ce qui était fondé que l’espérance. Ce sont ni l’insuccès, ni la misère, ni la maladie qui ont miné Mozart : cette déroute est de l’ordre du désarroi intellectuel.

Si cette musique touche si directement et si intensément, c’est qu’elle exprime un appel fondamental qui dépasse de loin le cas de Mozart lui-même, et qui vient du plus profond de nous tous. Nul musicien n’a accusé, avec autant de sincérité et d’intégrité, le fiasco final de toute idéologie devant la seule question qui importe et qui, à l’heure de la mort, est inéluctable : qu’en est-il de nous-mêmes ?



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Ludwig van Beethoven

Ludwig van Beethoven a été baptisé le 17 décembre 1770 à Bonn. Sa famille était originaire du Brabant, en Belgique. Son père était musicien à la Cour de Bonn, avec un penchant certain pour la boisson. Sa mère a toujours été décrite comme une femme douce, effacée et attentionnée. Beethoven disait d'elle qu'elle était "sa meilleure amie". La famille Beethoven eut sept enfants, mais seuls trois garçons survivront, dont Ludwig sera l'aîné.

Très tôt, Ludwig s'intéresse à la musique, et son père l'instruit jour et nuit, lorsqu'il rentre à la maison après les répétitions ou la taverne. Le don de l'enfant ne fait aucun doute, et son père Johann envisage d'en faire un nouveau Mozart, un enfant prodige.

Le 26 mars 1778, à l'âge de 8 ans, Beethoven présente sa première performance publique connue, à Cologne. Pour l'occasion, son père annonce qu'il a 6 ans. De ce fait, Beethoven pensera toujours être plus jeune qu'en réalité. Même bien plus tard, lorsqu'il recevra une copie de son acte de baptême, il estimera qu'il s'agit de celui de son frère Ludwig Maria né deux ans avant lui et décédé en bas âge.

Mais les capacités pédagogiques et musicales du père sont limitées. Bientôt Ludwig apprendra la musique, notamment l'orgue et la composition, auprès de musiciens renommés, tels que Gottlob Neefe. Ce dernier prendra totalement conscience des capacités extraordinaires de Beethoven. Il lui fera également connaître, au delà de la musique, les philosophes anciens et modernes.

C'est en 1782, à douze ans, que Beethoven publie sa première œuvre : 9 variations, en do mineur, pour piano sur une marche de Ernst Christoph Dressler (WoO 63). Et c'est l'année suivante, en 1783, que Neefe écrit dans le "Magazine de la musique", au sujet de son élève : "S'il continue ainsi, il sera sans aucun doute un nouveau Mozart".

En juin 1784, sur les recommandations de Neefe, Ludwig est nommé organiste à la cour de Maximilian Franz, prince électeur de Cologne. Il a alors 14 ans. Cette place lui permet de fréquenter un autre milieu que celui de sa famille et des amis de son père. Il rencontre alors des amis qu'il gardera toute sa vie : la famille Ries, la famille von Breuning et la charmante Eleonore, Karl Amenda, le violoniste, Franz Gerhard Wegeler, ami médecin qui ira également à Vienne, etc.

A la maison, peu à peu, Ludwig remplace son père. Financièrement tout d'abord, car Johann, souvent prit de boisson, est de moins en moins capable d'assumer sa place au foyer et sa fonction à la Cour. Le jeune Beethoven se sentira responsable de ses deux frères, et il assumera cette responsabilité toute sa vie, parfois même jusqu'à l'outrance.

Conscient lui aussi du don de Beethoven, c'est à ses frais que le Prince Maximilian Franz l'envoie à Vienne, en 1787, pour rencontrer Mozart et parfaire son éducation musicale. Vienne est alors la ville phare de la culture musicale. De la rencontre entre Mozart et de Beethoven, il n'existe que des textes à la véracité incertaine. Mozart aurait dit "N'oubliez pas ce nom, vous en entendrez parler !".

Mais une lettre rappelle Beethoven à Bonn : sa mère est mourante. La seule personne de sa famille avec laquelle il avait créer des liens affectueux forts et respectifs s'éteint le 17 juillet 1787.

Cinq ans plus tard, en 1792, Beethoven repart à Vienne, bénéficiant d'une rente assurée par le Prince Electeur pendant deux ans, toujours pour poursuivre son érudition musicale. Il ne reverra jamais plus sa ville natale. Son ami Waldstein lui écrit ces mots : "...recevez des mains de Haydn l'esprit de Mozart"...

A Vienne, le jeune musicien prend des leçons avec Haydn, puis avec Albrechtsberger et Salieri. Il étonne et séduit Vienne par sa virtuosité et ses improvisations au piano. En 1794, Beethoven compose son opus 1, trois trios pour Piano. L'année suivante, Beethoven organise sa première représentation publique à Vienne (une "Académie" au cours de laquelle il y joue ses propres œuvres. Puis suivra une tournée : Prague, Dresden, Leipzig et Berlin avant de partir pour un concert à Budapest.

Les rencontres que fait Beethoven à Vienne sont nombreuses. Tout le monde de la musique et de l'aristocratie admire le jeune compositeur. Ces mélomanes seront les plus grands soutiens de Beethoven. Il se fâchera régulièrement avec les uns et les autres, puis fera très souvent amende honorable. Son talent excusera son comportement excessif et impulsif.

En 1800, Beethoven organise un nouveau concert à Vienne comprenant, notamment, l'exécution de sa première symphonie. Bien qu'aujourd'hui nous la considérons classique dans sa conception et proche des symphonies de Mozart et de Haydn, à l'époque certains auditeurs trouvèrent cette composition étrange, osée, outrée. Le génie de Beethoven, qui n'est pas encore pleinement exposé à cette époque, pointe déjà, repoussant les usages musicaux établis.

C'est en 1801 que Beethoven avoue à ses amis de Bonn sa crainte de devenir sourd. A Heiligenstadt, en 1802, il rédige un texte célèbre ou il explique sa révolte face au drame qu'il vit : lui, un musicien, devenir sourd, voilà une fatalité à laquelle il ne souhaite pas survivre. Mais la musique le rappelle. Et il écrit qu'il sait avoir beaucoup d'autres domaines musicaux à explorer, à découvrir, et à léguer. Beethoven ne se suicidera pas, fera connaître peu à peu son handicap grandissant, et il se jettera dans la composition d'œuvres grandioses : d'exceptionnelles sonates pour pianos (notamment la Tempête et la Chasse, opus 31), la deuxième et la troisième symphonie - L'Eroïca - et bien d'autres encore.

Cette troisième symphonie, Beethoven l'écrit en hommage d'un grand homme, Bonaparte. Celui-ci est alors vécu comme le libérateur des peuples, issu de la Révolution Française, porteuse d'espoir. Lorsque le Premier Consul se déclarera Empereur, Beethoven effacera rageusement le nom de Bonaparte de la dédicace de cette symphonie.

Le 7 avril 1805 sera la première interprétation publique de la symphonie Héroïque.

Par ailleurs, Beethoven a enfin terminé son opéra, Leonore, le seul qu'il écrira. Il le corrigera et écrira 4 ouvertures différentes. Le nom de l'opéra deviendra alors Fidelio, contre la volonté du compositeur. Le 20 novembre 1805 se déroulera la première… devant un public clairsemé d'officiers Français. Car Napoléon, à la tête de son armée, a pris Vienne une première fois. Cela se reproduira en 1809.

Les années suivantes, l'activité créatrice du compositeur est intense. Il compose plusieurs symphonies, dont la Pastorale, l'ouverture de Coriolan, la fameuse Lettre pour Elise. Il prend quelques élèves, qu'il trouvera jeunes et belles et dont il tombera parfois amoureux. L'Archiduc Rudolphe, frère de l'empereur, devient également son élève, son ami, et bientôt l'un de ses protecteurs.

En 1809, Beethoven songe à quitter Vienne sur l'invitation de Jérome Bonaparte. Son amie de toujours, la Comtesse Anna Marie Erdödy, le retient avec l'aide de ses plus fortunés admirateurs : l'archiduc Rodolphe, le prince Lobkowitz et le prince Kinsky. Ces derniers s'engagent à verser à Beethoven une rente annuelle de 4 000 florins, lui permettant de vivre sans contrainte financière. L'unique condition est que le compositeur devra ne pas quitter Vienne. Beethoven accepte. Cette rente fera de lui le premier compositeur indépendant. Avant ce contrat, que ce soit Bach, Mozart ou Haydn, les musiciens et les compositeurs étaient des serviteurs au sein d'une maison d'un riche aristocrate. Un domestique sans plus de droit que les autres, mais avec des devoirs de compositions et de représentations. Une aire nouvelle voit ainsi le jour pour la musique : le compositeur est libre d'écrire quand il veut, ce qu'il veut, sur commande ou non.

En 1812, Beethoven prend les eaux à Teplitz, et rédige une lettre ardente à "L'immortelle bien-aimée". Cette lettre, qu'on retrouva dans un tiroir secret avec la testament d'Heiligenstadt, n'a pas fini de susciter les recherches et les suppositions des biographes du musicien. Nombreuses de ses élèves et de ses amies ont, tour à tour, été proposée destinataire de cette lettre. A moins qu'un nouveau document ne soit découvert, comme cela est encore parfois le cas dans les salles de vente ou une collection privée, il est fort probable que le secret amour de Beethoven soit préservé.

Fin juillet 1812, Beethoven rencontrera Goethe, à l'initiative de Bettina Brentano. Les deux grands hommes s'admirent mais ne se comprennent pas. Le compositeur trouve le poète - conseiller trop servile, et ce dernier estime que Beethoven est " tout à fait indompté ". Beethoven admire Goethe, et mettra en musique plusieurs de ses poèmes. Il gardera toujours un regret de ne pas s'être mieux entendu avec Goethe.

Mais l'un de ses protecteurs, le prince Lobkowitz, éprouve des difficultés financières, et le Prince Kinski meurt d'un chute de cheval et les descendants tentent de se défaire de l'obligation financière envers Beethoven. Ce sera le début de plusieurs procès que le compositeur entreprendra pour sauvegarder son indépendance financière. D'autres suivront pour des motifs différents.

Le tchèque Johann Nepomuk Maelzel prend alors contact avec Beethoven. Inventeur génial, probable inventeur du métronome, Maelzel avait déjà rencontré Beethoven et créé divers outils pour pour soutenir Beethoven et l'aider dans son audition défaillante : cornets acoustiques, système d'écoute raccordés au piano, etc. En 1813, Beethoven compose 'La victoire de Wellington', œuvre réalisée pour un instrument mécanique de Maelzel, le "panharmonica" (ou "panharmonicon". Mais c'est surtout le métronome qui fera évoluer la musique, et Beethoven, qui en a tout de suite saisi l'intérêt, annotera scrupuleusement nombre de ses partitions afin que ses œuvres soient interprétées comme il le souhaite.

L'Académie de 1814 regroupera cette oeuvre ainsi que la septième et la huitième symphonies. Ce sera également la réécriture de Leonore en Fidelio, seul opéra de Beethoven. Cette oeuvre remportera enfin le succès auprès du public.

Puis, le Congrès de Vienne, qui regroupe tout ce que le monde compte de têtes couronnées afin de débattre de l'avenir de l'Europe après Napoléon, sera un moment de gloire et de reconnaissance pour Beethoven. Il sera invité à jouer à plusieurs reprises et en éprouvera une légitime fierté.

Le 15 novembre 1815, Kaspar Karl, le frère de Beethoven, décède. Il laisse une femme que le compositeur surnommera 'La reine de la nuit' en raison des mœurs de la veuve, ainsi qu'un fils, Karl, qui a 9 ans. La vie de Beethoven va alors changer, car son frère avait inscrit sur son testament qu'il souhaitait que la tutelle de son fils soit exercée conjointement par sa femme et par Ludwig, son frère. Ce dernier prendra son rôle très au sérieux, mais le célibataire de 45 ans qui n'entend plus aura bien du mal à cohabiter et à comprendre l'enfant puis le jeune homme. Cette cohabitation sera source de nouveaux procès avec la mère de l'enfant, de conflits de générations et de nombreux tracas.

En 1816, Carl Czerny (futur maître de Franz Liszt), élève de Beethoven deviendra le professeur de musique de Karl, mais sans rencontrer le succès espéré par le grand compositeur. A cette époque, il termine le cycle de lieders " A la bien-aimée lointaine " et ébauche un premier thème pour la neuvième symphonie.
Deux ans plus tard, l'archiduc Rodolphe accède au cardinalat et Beethoven commence la composition de la Messe en ré. Elle ne sera pas prête pour l'intronisation, mais l'œuvre sera d'une incomparable richesse.

Gioachino Rossini fait un triomphe à Vienne à 1822 et il rencontrera Beethoven. La barrière du langage et la surdité de Beethoven ne permettront qu'un échange bref. Le compositeur viennois n'appréciait que modérément l'opéra italien, qu'il considérait comme peu sérieux.

La neuvième symphonie sera pratiquement achevée en 1823, la même année que la Missa solemnis. Liszt, qui a alors 11 ans, rencontrera Beethoven, qui assistera peut-être à son concert du 13 avril. Il félicitera chaleureusement le jeune virtuose qui, des années plus tard, transcrira l'intégralité des symphonies de Beethoven pour le piano.

Le 7 mai 1824 sera la date de la première interprétation de la neuvième symphonie et malgré les difficultés musicales, mais également celles des parties chantées, ce sera un succès. Malheureusement sans retombées financières. Les ennuis financiers n'ont de cesse de miner le compositeur. Il a bien de l'argent de côté, mais il le garde pour son neveu.

Ce sera ensuite l'époque des derniers quatuors, si difficiles encore pour le public d'aujourd'hui qui sait pourtant apprécier les autres oeuvres. La dixième symphonie est mise en chantier.

En 1827, Beethoven prendra froid en rentrant de chez son frère, avec lequel il s'est encore disputé. La maladie compliquera les autres maux dont Beethoven a souffert tout au long de sa vie. Il s'éteindra entouré de ses plus chers amis, le 26 mars 1827, alors qu'un orage se déchaîne.

La cérémonie funèbre se déroula à l'église de la Sainte Trinité. On estime que entre 10 000 à 30 000 personnes se sont réunies pour accompagner Ludwig van Beethoven vers sa dernière demeure. Franz Schubert, timide et admiratif du grand compositeur sans l'approcher, sera l'un des porteurs de flambeau avec de nombreux autres musiciens. Schubert décédera l'année suivante et sera enterré aux côtés de Beethoven.

Heinrich Anschütz, acteur, lit l'oraison funèbre de Beethoven, écrite par Franz Grillparzer, grand homme de lettre, devant les portes du cimetière de Währing (aujourd'hui, Schubert Park).



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fredchoucas
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fredchoucas
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   Posté le 22-06-2004 à 15:51:20   Voir le profil de fredchoucas (Offline)   Répondre à ce message   http://www.hitgratuit.org/membres/Funtasia/in.php3?id=7   Envoyer un message privé à fredchoucas   

Georges Aperghis

né en 1945, Athènes
Né à Athènes en 1945, de père sculpteur et de mère peintre, il hésite longtemps entre la peinture et la composition. Essentiellement autodidacte, il découvre la musique grâce à la radio et aux cours de piano qui lui donne une amie de la famille.

Il s'installe à Paris en 1963, s'initie au sérialisme du Domaine Musical, à la musique concrète de Pierre Schaeffer et de Pierre Henry, aux recherches de Iannis Xenakis dont il s'inspire dans ses premières oeuvres, puis en 1970, il décide d'approfondir un langage plus libre et plus personnel.

En 1971, il compose La Tragique Histoire du nécromancien Hiéronimo et de son miroir (pour deux voix de femme : chantée et parlée, un luth, un violoncelle), sa première pièce de théâtre musical, qui lie étroitement la musique au texte et à la scène, et préfigure sa propre dramaturgie musicale.

A partir de 1976, Georges Aperghis crée l'Atelier Théâtre et Musique (Atem), consacré au théâtre musical où il renouvelle complètement sa pratique de compositeur : il fait appel à des musiciens aussi bien qu'à des comédiens, intègre dans ses pièces tous les ingrédients vocaux, instrumentaux, gestuels, scéniques... en les traitant de façon identique. Il compose également des pièces pour instruments seuls, des oeuvres de musique de chambre, vocales, pour orchestre et des opéras.

C'est dans l'opéra qu'il réalise la synthèse de son travail : ici le texte est l'élément fédérateur et déterminant, la voix, le principal vecteur de l'expression. Il a composé sept ouvrages lyriques. Son oeuvre est ainsi résumée par Georges Aperghis lui-même : «faire musique de tout».



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