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bambi
Paul-Émile Victor, biographie d'un explorateur polaire (1907-1995)
Introduction

Les raisons militant en faveur d'une biographie de Paul-Emile Victor sont multiples. Désenchantées, les régions et les expéditions polaires peuvent accéder au statut d'objet d'histoire. L'activité autobiographique incessante de Paul-Emile Victor n'est pas un obstacle : elle fournit une base à la recherche et ses lacunes sont significatives : par exemple, Paul-Emile Victor n'est que rarement précis sur ses activités pendant la Seconde Guerre Mondiale. Enfin le fait que Victor soit mort récemment signifie aussi que ses proches et ses collaborateurs peuvent être interrogées et fournir des informations biographiques intéressantes.

Mais pourquoi faire la biographie de Paul-Emile Victor, plutôt que l'histoire des expéditions polaires françaises pendant la seconde moitié du XXe siècle ? D'une part, ces deux sujets se recouvrent largement : sans tomber dans l'excès, on peut en effet dire qu'objectivement, au sens où c'est son action qui a permis l'organisation de recherches scientifiques françaises dans les régions polaires, et culturellement Paul-Emile Victor incarne les expéditions polaires françaises. D'autre part, la vie de Paul-Emile Victor ne se résume pas à ses expéditions polaires : en témoigne la multiplicité de ses activités, au nombre desquelles on peut citer l'ethnographie, le scoutisme, l'écologie, l'écriture ou le dessin. Enfin il existe aussi une raison pratique : les archives personnelles de Victor sont mieux conservées, plus riches et plus facilement consultables que celles de l'institution qu'il a créée, les Expéditions Polaires Françaises (Missions Paul-Emile Victor).

Trois grandes séries de questions d'ordre biographique ordonnent cette recherche. Tout d'abord, qu'a apporté l'œuvre de Paul-Emile Victor ? Quelles sont ses grandes réalisations ? Dans quelle mesure étaient-elles nouvelles à l'époque où elles ont eu lieu ? Ensuite, puisqu'il s'agit de faire une biographie, quelle a été l'évolution, professionnelle et personnelle, de Paul-Emile Victor ? Quels sont les points de ruptures et de choix importants dans sa vie ? Comment a-t-il su s'adapter aux circonstances et aux situations nouvelles ? Enfin les questions d' « image » sont essentielles pour la biographie d'un explorateur médiatisé, et non médiatique. En quoi cette image construite correspond-elle à la réalité d'un caractère ou d'une œuvre ? Pour répondre à toutes ces questions, l'approche biographique choisie n'est réellement féconde que si elle est replacée dans des problématiques plus larges concernant l'histoire des explorations, des sciences, des techniques et des médias.

Sources

Parmi les différents fonds d'archives utilisés, on peut distinguer deux sources principales : le fonds Paul-Emile Victor conservé au Musée de l'Homme et le fonds Paul-Emile Victor conservé aux Expéditions Polaires Françaises, dont un classement scientifique a été établi à l'occasion de cette thèse. Cette documentation a été complétée par la consultation des archives des Expéditions Polaires Françaises et des archives du Groupe Paul-Emile Victor pour la défense de l'homme et de l'environnement, des papiers personnels d'Eliane Victor et de fonds du Service historique de la marine.

Essayer de reconstituer la vie de Paul-Emile Victor à partir des seules sources d'archives, même si celles-ci sont très riches quantitativement et qualitativement, serait une erreur. Paul-Emile Victor ayant beaucoup publié et ayant fait l'objet de beaucoup de commentaires dans la presse de son époque, il ne faut pas négliger les sources imprimées, qui permettent d'étudier l'influence et la popularité qu'il a pu avoir. C'est aussi le cas des sources radiophoniques, audiovisuelles ou cinématographique. Enfin l'état des sources ne serait pas complet sans ce luxe qui est accordé aux seuls historiens de la période contemporaine : les sources orales.

Première partie: Itinéraires d'un ethnographe

Chapitre premier

Enfance et formation (1907-1933)

Né le 28 juin 1907 à Genève, Paul-Emile Victor aurait pu s'appeler Paul, Eugène Steinschneider : ce n'est en effet que le 10 juin 1907 que son père Erich Heinrich Victor Steinschneider obtient de la Lieutenance générale impériale et royale du Royaume de Bohême, dont il est originaire, l'autorisation de changer son nom en Eric Victor. Loin d'être de typiques bourgeois jurassiens, comme leur fils se plaît souvent à les décrire, les parents de Paul-Emile Victor sont des immigrés d'origine juive d'Europe centrale. Ils font partie de ces familles bourgeoises d'industriels qui ont essaimé l'Europe pour des raisons professionnelles. C'est à Saint-Claude que Paul-Emile Victor grandit, dans un milieu social favorisé. La Première Guerre Mondiale est pour lui une expérience traumatisante : en 1915, son père, du fait de sa nationalité autrichienne, est accusé d'espionnage par des rivaux industriels profitant de l'antigermanisme ambiant, et arrêté. Il est blanchi en 1916, mais une violente campagne de presse, qui transforme « l'affaire Victor » en une sorte « d'affaire Dreyfus sanclaudienne », et de réelles menaces pesant sur lui et sa famille l'obligent à déménager à Lons-le-Saunier, où il rouvre une usine en 1919.

Cet épisode traumatisant, refoulé toute sa vie durant, est peut-être l'un des explications du désir de voyage hors d'Europe qui saisit Paul-Emile Victor à l'adolescence. Ce désir s'accompagne chez lui, du fait d'une éducation très protectrice et très puritaine, d'une tendance à la solitude rêveuse, que vient toutefois contrebalancer le scoutisme. Les années de formation de Paul-Emile Victor (1919-1933) peuvent être lues à la lumière d'une dialectique entre ce désir de partir, de devenir explorateur, et son avenir tout tracé de bourgeois provincial appelé à reprendre l'usine paternelle. Après un baccalauréat « sciences et langues vivantes », il intègre l'Ecole Centrale de Lyon en 1925, connue à l'époque pour former des fils d'industriels. Mais il la quitte sans passer les examens terminaux pour intégrer la marine marchande en 1928, puis la Royale en 1929-1930 à l'occasion de son service militaire. Une certaine désillusion sur le statut de marin, née du décalage entre le personnage rêvé par Paul-Emile Victor, le marin de Conrad…, et la pratique routinière du métier de marin, le ramène en 1931 à Lons-le-Saunier : il entre à l'usine de son père. Il y passe deux ans, mais finalement, le désir de voyage l'emportant sur le confort de la sédentarité, il quitte Lons-le-Saunier et l'usine en 1933, refusant de devenir « le-fils-Victor-successeur-de-son-père ».

Chapitre II

Les années Eskimo (1933-1939)

Ces années sont essentielles dans la vie de Paul-Emile Victor, car elles marquent le commencement de sa longue carrière polaire. Cette dernière débute sous un double parrainage : Mauss ­ Paul-Emile Victor sera ethnographe ­, et surtout Charcot ­ il sera spécialiste des régions polaires. Paul-Emile Victor suit les cours du premier à partir de fin 1933 et rencontre le second au début de 1934. La rencontre avec Charcot est déterminante : c'est grâce à l'appui du « gentleman polaire » que Paul-Emile Victor met le pied à l'étrier. Lors de son premier hivernage (1934-1935) à Ammassalik, sur la côte Est du Groenland, qu'il effectue avec trois compagnons, l'anthropologue Robert Gessain, le géologue Michel Pérez et le cinéaste Fred Matter, Paul-Emile Victor entame l'étude ethnographique des Eskimo d'Ammassalik. Servi par ses talents en langue et en dessin, il suit le programme et la méthode de Mauss : être curieux de tout, tout noter, tout dessiner et tout photographier, afin de comprendre tous les aspects de la société analysée, de la vie matérielle (techniques du corps, habitat, alimentation) à la vie spirituelle (légendes, contes, chamanisme), en passant par les techniques de transport et de chasse.

Rentré en France en 1935, Paul-Emile Victor acquiert une certaine célébrité, en écrivant des articles et donnant des conférences. Il décide de repartir au Groenland en 1936 : il effectue, en compagnie de Gessain, Pérez et du danois Eigil Knuth, une traversée d'ouest en est de la calotte glaciaire du Groenland en traîneaux à chiens, traversée tenant à la fois de l'exploit sportif, de l'expédition scientifique et de la mise à l'épreuve de soi. Arrivé sur la côte Est, il hiverne une seconde fois (1936-1937), vivant comme « un Eskimo parmi les Eskimo » et complétant ainsi l'étude ethnographique des Eskimo d'Ammassalik, qu'il décrit comme une « civilisation du phoque », c'est-à-dire une société organisée de part en part autour du phoque et de sa chasse.

De retour en France, il entame l'exploitation de ses expéditions ethnographiques : se succèdent conférences à succès, articles scientifiques et « grand public », la publication de son journal d'expédition (Boréal, 1938 ; Banquise, 1939) et l'introduction des techniques eskimo en France, avec l'organisation d'un raid transalpin en traîneaux à chiens en 1938. Devenu un personnage médiatique, il est conseiller technique du film de Jacques Feyder La loi du Nord en 1939. Tant sur le plan scientifique que sur le plan médiatique, c'est donc une prometteuse carrière d'ethnographe-explorateur qu'interrompt le déclenchement de la guerre en 1939.

Chapitre III

Paul-Emile Victor pendant la guerre (1939-1946)

Cette période était jusqu'à présent la moins connue de la vie de Paul-Emile Victor. Une étude précise des sources disponibles, en particulier ses archives personnelles, permet cependant de retracer et surtout de comprendre le cheminement de Paul-Emile Victor pendant la seconde guerre mondiale. Durant la Drôle de guerre, Paul-Emile Victor est adjoint à l'attaché naval pour les pays scandinaves. Basé à Stockholm, il est à la fois agent de renseignement et officier de liaison avec la Finlande, en guerre contre l'Union Soviétique. Pris de court à Copenhague par l'invasion allemande du Danemark en avril 1940, il parvient à rentrer en France. L'Amirauté le renvoie à son poste à Stockholm, où il assiste en spectateur éloigné et impuissant à la débâcle de l'armée française. Il quitte Stockholm en juillet 1940 et, après un long périple dans l'Europe en guerre (Finlande, Russie, Turquie, Grèce, Portugal, Espagne), regagne la France en octobre 1940.

Son caractère individualiste, son pacifisme humaniste, son dégoût de l'Europe, ses origines juives, l'expérience traumatisante qu'a été pour lui la Grande Guerre, le désir de poursuivre sa carrière, l'équilibre personnel qu'il a pu trouver lors de ses expéditions au Groenland : tout cela pousse Paul-Emile Victor à faire en octobre 1940 le choix d'une émigration de retrait ou d'éloignement. Grâce à ses relations dans le scoutisme, il obtient le 12 octobre 1940 du ministère de l'Instruction publique une mission le chargeant de poursuivre ses recherches ethnographiques et d'étudier les mouvements de jeunesse aux Etats-Unis. Après un séjour de deux mois au Maroc consacré à la réorganisation du scoutisme marocain (novembre-décembre 1940) et une expérience de six mois à la Martinique occupée à des travaux ethnographiques et à la mise en place de camps-écoles pour « l'Education Générale » (janvier-juin 1941), il arrive aux Etats-Unis en juillet 1941. Là, il partage son temps entre travaux polaires et scoutisme.

Mécontent de son inaction et ayant l'impression de ne pas accomplir son devoir en continuant ses recherches aux Etats-Unis d'une part, refusant de rejoindre les milieux gaullistes à cause de l'affaire de Syrie d'autre part, Paul-Emile Victor choisit au milieu de 1942 une voie d'engagement médiane : en juillet 1942, avec l'espoir de participer à une expédition de secours au Groenland, il s'engage dans l'US Air Force comme simple soldat. N'ayant obtenu la nationalité américaine qu'en septembre 1942, il ne peut participer à l'expédition de secours au Groenland. Après diverses affectations ne le satisfaisant guère (météorologie dans le Maine, formation de détective d'armée dans le Michigan), Paul-Emile Victor est enfin chargé d'une mission intéressante lui permettant d'utiliser ses compétences polaires : la mise au point du matériel destiné aux troupes de montagne, dans les Rocheuses, au Colorado, d'avril à juin 1943.

En juillet 1943, Paul-Emile Victor, après une tentative ratée de rejoindre les Forces Françaises Libres, est nommé lieutenant. Il est affecté à la section arctique de l'Arctic Desert and Tropical Information Center (ADTIC), au sein duquel ses compétences polaires peuvent pleinement s'exprimer. Son rôle est triple : rédacteur de manuels polaires (survie, déplacement, habitat… en milieu arctique), instructeur polaire (organisation de camps d'entraînement arctiques dans le Colorado) et conseiller arctique pour la création, la formation et l'entraînement de trois escadrilles de recherches et de sauvetage (Search and Rescue). C'est d'ailleurs à ce dernier titre qu'il reçoit en novembre 1943 et février 1944 deux formations de parachutiste. En avril 1944, il obtient enfin une mission de « terrain », puisqu'il est affecté à l'escadrille Alaska de Search and Rescue, chargée de porter secours aux avions en difficulté. Cette période de secourisme aérien est cependant très brève puisque, dès mai 1944, le lieutenant Victor se voit confier une autre mission : organiser une unité de Search and Rescue maritime dans le détroit de Béring. Grâce à son talent d'organisateur, il va mener cette mission à bien en cinq mois : choix d'un bateau ; formation d'un équipage en Louisiane, adaptation du bateau retenu à la navigation en région polaire ; conduite du bateau de Seattle jusqu'à Nome en Alaska. En novembre 1944, l'US Air Force accède enfin à ses demandes répétées d'affectation en France, qu'il rejoint en décembre 1944. En 1945-1946, la vie de Paul-Emile Victor se partage entre la France et les Etats-Unis et se conclut par sa démobilisation et son mariage avec Eliane Decrais en 1946.

Deuxième partie: L'organisation des terroirs

Chapitre IV

La création des Expéditions Polaires Françaises (Missions Paul-Emile Victor) (1946-1947)

Pendant la guerre, Paul-Emile Victor prend conscience du fait qu'une expédition scientifique de grande envergure visant à l'étude complète de la calotte glaciaire du Groenland est désormais techniquement possible, du fait du progrès des techniques polaires que représentent la mécanisation des moyens de transport et le développement de l'aviation polaire. C'est à l'organisation d'une telle expédition qu'il s'attelle dès sa démobilisation en 1946. Grâce à de nombreuses démarches auprès des autorités et à une habile campagne de presse, il parvient, malgré les difficultés financières de l'époque, à convaincre le gouvernement de l'utilité scientifique et stratégique qu'il y a à financer son projet d'expédition scientifique mécanisée au Groenland, auquel il a adjoint, sur une idée de Yves Vallette, Robert Pommier et J. A. Martin, le projet d'une expédition antarctique visant à réaffirmer la souveraineté de la France sur la Terre Adélie. C'est ainsi que les Expéditions Polaires Françaises (EPF) (Missions Paul-Emile Victor) naissent le 28 février 1947.

Une fois l'accord de principe du gouvernement obtenu, Paul-Emile Victor va, tout au long de l'année 1947, préciser le projet arctique, son ami André-Frank Liotard étant chargé du projet antarctique. Un budget est établi ; un programme scientifique précis de l'étude de la calotte glaciaire du Groenland est mis en place par la Commission Scientifique des EPF, alors qu'est prévue une logistique mécanisée originale, s'appuyant sur des véhicules chenillés (weasels) et le parachutage de matériel par avion. S'il parvient à mobiliser autour de son initiative une bonne partie des milieux scientifiques et gouvernementaux, l'échec du Centre Polaire Charcot lui aliène une partie des anciens polaires français.

Chapitre V

La période héroïque des Expéditions Polaires Françaises (1947-1952)

Le déroulement et les résultats des expéditions elles-mêmes étant déjà bien connus, il convient plutôt de s'attarder sur le rôle de Paul-Emile Victor au cours de celles-ci. Pendant cette période, d'explorateur polaire il devient entrepreneur d'expéditions polaires scientifiques et mécanisées de grande envergure, ou autrement dit un explorateur moderne. Tout d'abord Victor est un innovateur. Sa principale innovation, c'est bien sûr l'idée logistique nouvelle qui est à la base des EPF, à savoir l'emploi massif de moyens techniques mécaniques pour la réalisation d'expéditions polaires à buts scientifiques. Ensuite Victor est un mobilisateur d'énergies : il réussit, parfois avec plus ou moins de bonheur, à regrouper autour du projet des EPF, les autorités françaises, un certain nombre de grands scientifiques, des polaires, des techniciens, l'Armée et la Marine, la presse et l'opinion publique. Victor est bien sûr un organisateur. Son rôle dans les Expéditions Polaires Françaises, tant lors de la préparation des expéditions en France que lors de leur réalisation sur le terrain, est avant tout un rôle d'organisation. En France, il fait les démarches pour obtenir de l'argent, nerf des expéditions, recrute le personnel, supervise l'achat du matériel, etc. Sur le terrain, il coordonne les groupes, effectue les calculs logistiques et financiers, prend les décisions importantes après consultation, essaie de débloquer les situations, bref, organise et oriente l'expédition, ce qui ne veut pas dire qu'il ne se trompe jamais. Enfin, Victor est un communicateur. Ses talents d'orateur ou de vulgarisateur, son goût pour la représentation, la prise de conscience que la promotion médiatique est nécessaire pour obtenir le soutien des autorités, la logique de médias qui par essence cherchent ou fabriquent des héros-hérauts dans tous les sujets qu'ils abordent : tout pousse Paul-Emile Victor à utiliser la communication lors de la préparation ou de l'exploitation des expéditions.

Entrepreneur d'expéditions polaires modernes, Paul-Emile Victor est nécessairement, vu l'importance des moyens mis en œuvre et des objectifs poursuivis, le chef d'une équipe. Son principal mérite, même si cela n'a pas toujours été sans mal, est d'avoir su s'entourer de collaborateurs compétents dans leur spécialité. Les plus importants de ces collaborateurs sont, sans compter les scientifiques et en simplifiant, Liotard, dont les relations sont importantes, Pérez, l'ami de toujours, Guillard, le plus efficace sur le terrain, Rouillon, l'organisateur, et Vaugelade, l'administrateur. Personnage médiatique et populaire dans l'opinion publique française, Paul-Emile Victor perpétue à raison le personnage de l'explorateur polaire français, dans la lignée de Dumont d'Urville et surtout de Charcot. A l'étranger, il est bien introduit dans les milieux polaires scandinaves et américains, et avec la publication progressive des résultats obtenus par les Expéditions Polaires Françaises la reconnaissance va venir. S'il est globalement soutenu par les autorités et la presse, Paul-Emile Victor a cependant des adversaires, en particulier dans les milieux scientifiques et dans la Marine.

Troisième partie: Le temps des expéditions internationales (1952-1960)

Chapitre VI

Paul-Emile Victor et les expéditions américaines au Groenland (1952-1957)

N'ayant pu obtenir de financement pour poursuivre les campagnes EPF, Paul-Emile Victor se tourne, fin 1951, vers son deuxième pays : les Etats-Unis. Les relations qu'il a conservées et entretenues depuis la guerre avec les milieux polaires américains, ainsi que la réussite logistique des EPF, qui ont développé les transports terrestres au Groenland ­ alors que les Etats-Unis ont tout misé sur l'aviation, lui permettent de devenir conseiller technique spécial pour le Groenland de l'armée américaine. C'est à ce titre qu'il participe aux campagnes 1952 et 1953 de l'Opération Nord au Groenland. En sus de son rôle général de conseiller, notamment pour l'établissement du plan d'opérations, il dirige les reconnaissances aériennes et les opérations de soutien aérien. Il effectue donc de nombreux vols au-dessus du Groenland, ce qui lui permet d'acquérir une connaissance sans égal de la géographie de ce dernier. Après cette phase de terrain (1952-1953), sa coopération arctique avec les Américains entre dans une phase de cabinet (1954-1957), avec en particulier la publication de l'importante Geography of Northeast Greenland en 1955.

Chapitre VII

Paul-Emile Victor et l'Année Géophysique Internationale (1954-1959)

Lors de la préparation de l'Année Géophysique Internationale (AGI), préparation qui commence réellement en 1954, Paul-Emile Victor est marginalisé par l'action conjuguée de deux adversaires : le père Lejay, et derrière lui une bonne partie du milieu scientifique français, et Bertrand Imbert, et derrière lui la Marine. Lejay nomme Imbert Chef des expéditions antarctiques françaises de l'AGI, mais ce dernier ne peut se passer de la logistique des EPF et c'est ainsi que Paul-Emile Victor obtient la présidence du sous-comité antarctique français, fonction à vrai dire quelque peu honorifique.

Marginalisé, Paul-Emile Victor ne va cependant pas rester inactif pendant l'AGI. Il décide de jouer sa carte personnelle. C'est d'abord en 1956, après un premier voyage en Terre Adélie, l'organisation d'un tour du monde aérien transpolaire, dont la guerre de Suez empêche la réalisation. Puis c'est, en 1957, à l'occasion d'une mission d'observation des opérations antarctiques américaines de l'AGI, la réalisation d'une sorte de « pèlerinage polaire » au pôle Sud. Enfin c'est surtout, en 1958 et 1959, la reprise en main des expéditions en Terre Adélie après l'AGI et l'obtention d'une décision gouvernementale rendant permanentes les expéditions françaises en Terre Adélie et garantissant de ce fait la pérennité des EPF, Paul-Emile Victor ayant le mérite de comprendre que la coopération internationale et les recherches scientifiques initiées lors de l'AGI en Antarctique étaient appelées à se poursuivre.

Chapitre VIII

Paul-Emile Victor et l'Expédition Glaciologique Internationale au Groenland (1955-1960)

L'Expédition Glaciologique Internationale au Groenland (EGIG) est en quelque sorte la suite des premières expéditions EPF au Groenland, tant au niveau des buts poursuivis (étude de la calotte glaciaire du Groenland) que des moyens logistiques utilisés (petits groupes mécanisés soutenus par avion). Elle s'inscrit dans la logique d'internationalisation des expéditions polaires et la participation, sous la direction des EPF, de l'Allemagne, la Suisse, le Danemark et la Belgique, peut presque la faire considérer comme le volet polaire de la construction européenne. Après une longue et minutieuse préparation (1955-1958), pendant laquelle son réseau polaire américain s'avère bien utile, Paul-Emile Victor dirige en 1959 la campagne principale de l'EGIG. Cette campagne constitue l'apogée de sa carrière polaire : logistique parfaitement au point, étude systématique (glaciologie, météorologie, sondages séismiques…) de l'inlandsis groenlandais, reconnaissance internationale de l'excellence des méthodes scientifiques et techniques des EPF et de leur homme-orchestre, Paul-Emile Victor.

Quatrième partie: Un polaire engagé (1960-1995)

Chapitre IX

Un homme très actif aux intérêts diversifiés (1960-1976)

Le début des années 1960 marque un tournant dans la vie de Paul-Emile Victor. Sa vie personnelle, suite à son divorce et à son remariage, suite aussi à sa découverte de la Polynésie, se réorganise. De 1960 à 1976, il reste encore très actif dans le domaine polaire : il organise des expéditions au Groenland et en Terre Adélie, participe à des commissions internationales, publie de nombreux ouvrages de vulgarisation, etc. Mais après l'apogée polaire qu'a été pour lui la campagne 1959 de l'EGIG, il ne dirigera plus d'expédition de grande ampleur sur le terrain. Par contre, il se sert de la reconnaissance qu'il a acquise dans le domaine polaire pour s'engager publiquement dans d'autres domaines, et ainsi diversifier ses activités et son influence : l'étude et le développement de la Polynésie et surtout l'écologie. Avec le projet de Centre d'Etudes Polynésiennes (CEP), au début des années 1960, Paul-Emile Victor cherche à rééditer avec les sciences humaines en Polynésie ce qu'il a si bien réussi avec les sciences dures dans les régions polaires : créer un outil permettant la recherche scientifique. Mais le projet de CEP n'est finalement pas mis en œuvre et Paul-Emile Victor se tourne alors vers l'écologie. Pour lui cette dernière doit être avant tout une science au service de l'homme. Son engagement en faveur de l'écologie est avant tout pratique : il participe aux travaux de la Commission des loisirs et des sports de plein air et mène des campagnes d'information sur l'eau ou les forêts par le biais du « Groupe Paul-Emile Victor pour la défense de l'homme et de son environnement », créé en 1974.

Chapitre X

Retraite à Bora Bora (1976-1995)

En 1976, Paul-Emile Victor a 69 ans. Il prend sa retraite administrative : même si Victor reste directeur honoraire des Expéditions Polaires Françaises, c'est Jean Vaugelade qui les dirige désormais. Cette même année, il décide de s'installer définitivement avec sa femme Colette et son fils Teva sur le Motu Tane dans le lagon de Bora-Bora. La retraite professionnel s'accompagne donc d'un certain retrait du monde et d'un certain repli sur soi : il rédige ses mémoires et s'adonne à la création artistique. Mais ce retrait n'est que relatif et il n'est pas synonyme d'inactivité : Paul-Emile Victor reste un homme influent et engagé. Cet engagement continu se déploie dans trois directions : les expéditions polaires françaises, l'écologie et l'action en faveur des jeunes. Il s'accompagne d'une reconnaissance publique grandissante. Paul-Emile Victor meurt en mars 1995.

Conclusion

Ame de l'exploration polaire française pendant au moins quarante ans, ethnographe et logisticien polaire reconnu sur le plan national et international, pionnier de l'écologie, polygraphe de talent, artiste, homme d'influence et populaire, il est certain que Paul-Emile Victor a marqué son époque. Parmi tant de facettes, il est difficile de dire ce qui restera de son œuvre. Deux points semblent particulièrement importants : l'œuvre ethnographique des années 1934-1937 et le rayonnement scientifique et polaire de la France qu'ont permis les Expéditions Polaires Françaises et qui se poursuit encore de nos jours. C'est donc certainement comme « explorateur français des régions polaires » (Petit-Larousse), que Paul-Emile Victor restera dans l'histoire. Dans l'histoire des explorations polaires, il est un « pivot » sur le plan des objectifs visés (même si les expéditions de Charcot avaient déjà pour seul but la recherche scientifique, et non le profit ou l'exploit sportif), sur le plan logistique et technique (Paul-Emile Victor inaugure l'ère de la totale mécanisation des expéditions polaires) et enfin sur le plan médiatique.

Pièces justificatives

Sélection de pièces originales provenant des archives personnelles de Paul-Emile Victor et de la photothèque des Expéditions Polaires Françaises.

bambi
Vasco de Gama
Les origines de la colonisation de l'Inde
Vasco da Gama (Sines, Alentejo v. 1469-Cochin, Inde 1524)
Navigateur portugais, premier Européen à avoir ouvert la route de l'Inde en contournant l'Afrique.

Les débuts :
Bien que sa date de naissance ne soit pas connue avec précision, Vasco de Gama fut issu d'une famille illustre et bénéficia d'une éducation à la fois militaire et scientifique. Les récentes découvertes africaines avaient fait de la navigation le domaine de prédilection des Portugais ambitieux et comme beaucoup de ses contemporains, il eut à étudier la géographie de Strabon et Ptolémée avant d'être captivé par les écrits de Vespucci. C'est donc très naturellement qu'il appartenait à la prestigieuse école nautique de Sagres.

La période qui s'étend de la fin de ses études et la grande expédition de 1497 n'est pas très connue non plus. Vasco de Gama se fit remarquer cependant en rendant d'importants services au Roi Jean II, notamment en saisissant les navires corsaires français qui pillaient les convois chargés d'or de retour d'Afrique. Jean II bénéficiait alors d'importants renseignements : Bartolomeu Dias venait de passer (enfin !) le cap de Bonne-Espérance et les explorateurs terrestres Covilha et de Paiva partis à travers le monde arabe, avaient pu élaborer une carte de la côte orientale de l'Afrique. En 1495, Jean II décida d'une nouvelle expédition qui devait cette fois-ci atteindre l'Inde et en confia le commandement à Vasco de Gama. Il avait alors 26 ou 27 ans. Cependant le roi mourut peu après et le projet fut ajourné. Deux ans plus tard, le nouveau roi Manuel Ier le rappela en janvier 1497 et lui confia une flotte composée de trois lourdes nefs, d'une caravelle et de 160 hommes, ainsi que des lettres pour les souverains autochtones. Après une cérémonie en grande pompe au mois de juin, l'expédition quitta l'embouchure du Tage le 8 juillet.

Le voyage :
Vasco de Gama fit mettre les voiles vers le large et évita les mauvais vent côtiers. Il doubla les îles du Cap Vert le 3 août, puis continua vers le sud-ouest, le dos à l'Afrique. Ce n'est qu'au 31e parallèle, presqu'à la latitude du cap qu'il retourna vers l'est, poussé par des vents favorables. Il fit escale le 8 novembre à Sainte-Hélène pendant une semaine, puis franchit le fameux cap le 22 avec les difficultés attendues. Il passa Noël dans un havre qu'il nomma ainsi Natal (actuellement Durban), puis atteignit au début de février 1498 les côtes décrites par Covilha. Il s'agissait d'une zone au commerce propice qui avait enrichi les royaumes frontaliers grâce au commerce de l'or, de l'ivoire, mais aussi des esclaves. Le commerce était essentiellement arbitré par des marchands arabes mais intéressait aussi les rois africains, les Indiens et les Chinois (qui avaient exploré cette côte au début du XVe siècle). Les deux grands ports étaient Mogadiscio (que Gama atteignit en mars) et Kilwa où dominait l'Islam. Vasco de Gama fit l'amère constatation de ne pas y trouver le Prêtre Jean et dut au contraire endurer les mauvais traitements dus à sa religion. Ce n'est que plus au nord, arrivé à Mélinde qu'il sympathisa avec le Sultan local qui lui confia un pilote italien. Le 24 avril, il quitta cette Afrique inhospitalière et coupa au large vers la côte de Malabar. Le 19 mai, il arrivait sur la côte du Dekkan et mouilla à Calicut. Il avait atteint son but.

L'aventure indienne :
Dans Calicut, Vasco de Gama fit la connaissance d'un marchand tunisien qui parlait le Castillan et qui allait le conduire au zamorin qui gouvernait l'endroit. Après avoir envoyé deux émissaires annoncer son arrivée, le zamorin vint à sa rencontre et le reçut avec les honneurs réservés aux ambassadeurs des plus grands monarques. Lors de l'entrevue, il fut surtout question de nouvelles relations commerciales. Cependant l'enthousiasme du zamorin finit par inquiéter les marchands arabes qui représentaient une proportion importante de ses sujets et ceux-ci surent le convaincre que Gama était venu pour pillage. Après quelques heures d'arrestation, Gama fut autorisé à retourner à ses navires, et moyennant une prise d'otage, il fit libérer ceux de son équipage encore retenus. Il leva l'ancre le 27 août 1498.

Le retour :
Le retour ne fut pas très facile. Les vents ne furent pas favorables et le moral assez bas. Certes le but était atteint, mais le voyage ne constituait pas un exploi aux yeux de Gama : les Européens avaient nettement sous-estimé l'organisation et l'économie de la région et semblaient bien être le dernier peuple arrivé à Calicut. Après avoir embarqué un ambassadeur du sultan de Mélinde, Gama fit route vers le Portugal qu'il atteignit en septembre. Le voyage avait duré plus de deux ans.
A son arrivée, Manuel le reçut avec la plus grande magnificence. De nombreuses fêtes furent célébrées et le roi fit aussitôt armer une nouvelle escadre, beaucoup plus importante, qu'il confia à Pedro Alvares Cabral et dont le but était de prendre possession des terres et du monopole commercial par la force. Celle-ci partit entre mars 1500 et juillet 1501 et confirma la nécessité d'user de la force pour s'implanter.

Le deuxième voyage :
Vasco de Gama repartit pour l'Inde en février 1502 avec cette fois-ci une flotte de 23 bateaux, ce qui lui permit de soumettre les royaumes de la côte orientale de l'Afrique. Désormais il avançait en semant la terreur, brûlant notamment un navire égyptien avec son équipage. Arrivé en Inde, il effraya le zamorin qui pourtant concédait l'établissement d'un comptoir, en cannonant la ville et en organisant un blocus. Finalement il rentra à Lisbonne en décembre 1503 en laissant une présence portugaise sous le commandement de Vicente Sodré.

La retraite :
Là se terminait provisoirement l'aventure indienne pour Gama. L'expédition suivante fut confiée à Alphonso de Albuquerque et à d'autres chefs de guerre qui allaient achever sans lui la conquête du sud du Dekkan. Gama bien que couvert de gloire fut ainsi laissé dans l'inaction pendant 21 ans. Ce n'est qu'après la mort du roi que son successeur Jean III le rappela et le nomma vice-roi de l'Inde en 1524. En fait, cela ne dura pas 4 mois car Gama mourut à Cochin la même année. En 1538 son corps fut rappatrié et après lui avoir rendu les plus grands honneurs, il fut inhumé au couvent des Carmes de Vidigueyra, la ville de sa première retraite.

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Samuel Champlain
(1567 Brouage - 1635 Québec)
Explorateur français

Il s'embarque avec un marchand de fourrure, Sieur du Pont (ou Pontgravé) en 1603. Ceux-ci visitent la future Acadie puis se rendent à Tadoussac, petit poste oû se troquent les fourrures. Champlain part explorer le Saguenay et remonte la grande rivière jusqu'à Hochelagua. Il retrouve Pongravé à Tadoussac et repart avec lui avant le début de l'hiver. Champlain revient avec des Monts, un autre marchand qui a obtenu pour un temps le monopole sur les fourrures. Ils fondent Port-Royal en Acadie, et Champlain reste, explorant et faisant un magnifique travail de cartographie. Mais des Monts fait faillite et la colonie périclite. Les colons reviennent en France (1607). Avec de nouveaux colons, Champlain repart s'installer, mais cette fois-ci beaucoup plus loin à l'intérieur du continent: à Québec. Quand il meurt en 1635, la colonie vit toujours misérablement et se compose de moins de 200 personnes. Les rois de France ne s'intéressent pas encore à ce bout du monde.

bambi
Hernan Cortes
1485-1547
Conquérant espagnol

Cortes est issu d'une famille de petite noblesse installée à Médiline. Sa famille l'envoie à Salamanque faire des études de droit qui ne le passionnent guère. Sans avoir obtenu de diplôme, on le retrouve cependant notaire en 1504 à Santo Dominguo (Hispaniola). L'Ile découverte par Christophe Colomb est alors une toute jeune colonie. Là, il abandonne le métier de la plume pour celui des armes. Il prend part à la conquète de Cuba par Diego Velasquez (1511). Il s'y fait remarquer par ses actions d'éclats et Velasquez est nommé gouverneur de Cuba. Ce dernier le charge alors d'une importante expédition vers le Yucatan à la fin de l'année 1518 (800 hommes, des chevaux, de l'artillerie), tout en se méfiant jalousement de cet ambitieux lieutenant.

Dès son débarquement, il fait la connaissance de sa future maîtresse, Dona Marina, une rebelle indienne qui parle le maya. Par l'entremise d'un interprète de l'expédition, elle lui ouvre la voie de nombreuses alliances. Après de nombreuses péripéties et batailles, Hernan Cortes entrant dans Tlaxcala en 1520
Cortes s'empare sans violence de l'empereur Moctezuma II dans la ville de Mexico en 1520 (historiquement au milieu d'un lac). Pendant l'absence de Cortes, la tension monte dans la ville, les indiens sont de plus en plus hostiles aux imposteurs espagnols (ils se sont faits passer pour des dieux).

L'empereur est blessé, puis meurt, en voulant calmer les citadins. Cortes revenu, il ne peut qu'organiser une fuite pitoyable et meurtrière (en particulier pour ses alliers indiens). C'est la Noche Triste. Les Espagnols et leurs alliers reviennent assiéger et conquérir la ville en 1521 avec une forte artillerie. La victoire est sanglante. La pièce maîtresse de l'empire mexicain a cédé, l'empire tombe pratiquement comme un fruit mûr dans les mains des Espagnols.

Charles I d'Espagne (Charles Quint) récompense Cortes en lui donnant le titre de gouverneur de la Nouvelle Espagne (1522) et Cortes se rend lui-même en Espagne en 1528. Mais rapidement, comme dans le cas de Christophe Colomb, Cortes perd le contrôle administratif de l'ancien empire. Les inimitiés qu'il s'est créées autour de lui ont fini par remonter jusqu'à la cour d'Espagne. Et la couronne en profite pour placer des pions plus sûrs à la place des aventuriers toujours instables.

Cortes continue à explorer la région. Il ouvre la voie vers la Californie vers 1535. Il revient pour la deuxième fois en Espagne pour participer à une campagne militaire en Algérie (1540). Il meurt près de Séville sans la reconnaissance qu'il attendait de son roi et empereur Charles Quint.

bambi
Jacques Cartier
1491-1557
Explorateur Français

Citoyen de Saint-Malo. Au nom de François Ier, il partit en 1534 avec deux navires vers l'ouest à la recherche d'un passage vers la Chine. Il parcourt la côte canadienne vers le nord puis vers le sud autour du golfe du Saint-Laurent et ramène deux enfants amérindiens. L'année suivante, le roi le renvoie explorer le continent. Cartier pénètre alors dans le fleuve du Saint-Laurent qu'il appelle "le Grande Rivière". Les jeunes indiens à son bord veulent l'entrainer à la recherche du royaume légendaire (et riche en or) du Saguenay. Il continue le long du fleuve jusqu'au village de Stadacona (actuel Québec), puis encore jusqu'au village de Hochelaga sur l'île de Montréal. L'expédition est toujours très bien accueillie. Puis il hiverne avec son équipage dans de difficiles conditions. Son troisième voyage est effectué en 1541 sous les ordres de Roberval qui part en réalité un an plus tard que Cartier. Cartier hiverne à nouveau, alors que l'animosité gronde entre les marins et les indiens. Au printemps Cartier n'attend plus Roberval. Il préfère rentrer au plus vite. il finit par croiser Roberval à Terre-Neuve mais refuse d'obéir à ses ordres et remet le voile vers la France.

bambi
Jean Cabot
(1440? - 1498)
Navigateur et explorateur au service de l'Angleterre

Italien de Gênes. Citoyen de Venise au début des années 1470 au bout des 15 ans de résidence obligatoire. Il fut impliqué dans le commerce des épices et fit probablement de nombreux voyages au moyen-orient pour celà. De ce commerce avec l'orient naquit le désir de contourner l'orient pour atteindre les richesses des Indes et, de manière indépendante, Cabot aurait lui aussi pensé à partir vers l'ouest.

On le retrouve à Valence cherchant à obtenir des renseignements de Christophe Colomb l'année de son retour triomphal (1493). Curieusement, c'est à l'Angleterre que Cabot proposa ses services d'explorateur.

Henri VIII autorisa un tel voyage et Cabot partit en Mai 1497 de Bristol avec 3 navires. Il suivit une route très au Nord de celle suivie par Colomb et finit par atteindre Terre-Neuve. Il indiqua d'énormes quantité de poissons près de cette terre. Il longea la côte nord américaine. L'année suivante, il repartit avec 5 navires dont on ne connait que le destin d'un seul qui, à la suite de problèmes, s'arrêta en Irlande. Les autres ne donnèrent aucune nouvelle. On imagine donc une fin tragique. Cependant l'exploration se poursuit petit à petit puisque l'on note des départs réguliers (mais peu nombreux) pour cette destination. Probablement des marchands attirés par les richesses en poisson.

Son fils, navigateur comme son père, travailla longtemps pour l'Espagne avant de revenir en l'Angleterre.

bambi
Christophe Colomb
1451-1506
Explorateur italien

Les débuts.
Né à Gênes. Marin très tôt. Fait partie en 1476 d'un convoi en partance pour Lisbonne et l'Angleterre. Le convoi es attaqué par des français. Colomb se réfugie à Lagos puis retrouve son frère, un cartographe, à Lisbonne (Portugal) où vit une grande colonie de génois. Il épouse en 1479 la fille d'un des premiers colonisateurs de Madeire, Filipa Perestrelo e Moniz, qui lui donnera un fils et mourra peu de temps après. Colomb se perfectionne à la science de la navigation. Voyage en Afrique et peut-être en Islande. À partir de 1484, environ, il devient possédé par l'idée que l'on peut éviter le long et couteux voyage vers les Indes par l'Afrique, en coupant par l'Atlantique.

Était-ce possible?
À vrai dire, il n'est pas le premier à penser une telle chose. Les savants de l'époque concevaient en effet comme possible un tel voyage, grâce aux écrits de Ptolémée qui donne même un chiffre pour cette distance: 16.090 km. En fait, la distance est largement sous-estimée mais personne ne le savait à l'époque. Colomb se persuade en lisant différents auteurs que la distance donnée par Ptolémée est surestimée et qu'elle se réduit à 2414 km. La lecture de Marco Polo, notamment, lui donne l'espoir d'atteindre les riches territoires du Cipangu (Japon).

Le projet de Colomb face aux grands.
Un comité d'experts de Jean II du Portugal rejette son projet. Furieux, Colomb décide de le présenter à des chefs d'états désireux de rivaliser avec le Portugal. En 1486, il est finalement reçu par Ferdinand d'Aragon et Isabelle de Castille. Un comité d'experts se réunit et rend un verdict négatif en 1490. En 1491, le comité est prêt d'accepter, mais les exigences démesurées de Colomb (titre de noblesse, amiral de l'océan, gouverneur et vice-roi de toutes les terres à découvrir) font échouer à nouveau le projet. C'est finalement le conseiller du roi Ferdinand qui convaint la Reine que la somme à investir est dérisoire comparée aux possibles retombées.

Le premier voyage.
Colomb part donc avec trois navires et 90 membres d'équipage de Palos le 3 août 1492. Arrêt aux Canaris. et après une période de tension toujours de plus en plus vive entre Colomb et ses marins, le 10 Octobre, les premiers signes indirectes de terre se montrent. le 12, la terre est en vue. C'est une île, Guanahami (San Salvador). Les "indiens", puisque Colomb n'hésite pas à les appeler ainsi dans ses descriptions, lui assurent qu'il faut aller plus à l'ouest pour trouver de l'or. le 28 octobre, il est à Cuba. Colomb est persuadé d'avoir atteint le continent asiatique et de connaître sa position exacte sur le continent. La flotille se dirige alors vers l'est le long de la côte cubaine. Le capitaine de la Pinta déserte à la poursuite de l'or vers l'ouest. À Hispaniola, une grande île à l'est de Cuba, il trouve enfin de l'or en quantité. La santa-Maria s'échoue et devient inutilisable. Colomb laisse 39 hommes dans un fort et rentre au plus vite vers l'Espagne. Sur le chemin du retour, il croise la Pinta. Le retour est difficile.

Le deuxième voyage.
À peine arrivé, Colomb pense déjà à un second voyage encore plus ambitieux. Il repart de Cadiz en septembre 1493 avec une flotte de 17 navires et 1500 hommes avec l'idée de fonder une colonie. Il retrouve le fort détruit par les indiens et installe la colonie sur un autre emplacement appelé Isabela. Colomb repart avec trois caravelles vers l'ouest et explore la côte sud de Cuba. Son enthousiasme d'avoir trouvé l'asie n'est pas diminué. Retour en 1496.

Le troisième voyage.
Ce n'est qu'en 1498 qu'il assemble une flotte de 8 navires pour un troisième voyage. Le 31 juillet, il arrive avec trois navires (le reste des navires est détourné vers Hispaniola pour soulager la colonie où sévit une dure pénurie de produits de première nécéssité) à l'île de Trinidad, juste en face de la côte sud américaine. Enfin, devant la masse d'eau fraîche se déversant dans la mer, il déduit que la côte à l'ouest ne peut être qu'un continent mais préfère revenir régler les affaires de plus en plus désorganisées de la colonie. Devant les plaintes et rumeurs contre Colomb, Ferdinand et Isabelle dépêche Bodadilla vers la nouvelle colonie. Celui-ci fait arrêter les frères Colomb et les renvoie en Espagne pour être jugés.

Le quatrième voyage.
En Espagne, les choses s'arrangent. Colomb peut repartir en 1502 mais il a été écarté des affaires de la nouvelle colonie. Colomb reprend donc son rôle d'explorateur. Il arrive aux côtes du Honduras et descend vers le sud à la recherche d'un passage vers l'ouest. L'or abonde au Panama et provoque des incidents avec les indiens. Colomb apprend qu'il est en face d'un isthme qu'il prend pour l'isthme malaisien. Les quatre navires de Colomb sont un à un perdus. Colomb doit dépêcher quelques hommes sur un canot pour réclamer de l'aide à la colonie d'Hispaniola qui ne se presse pas pour venir en aide à son fondateur. Colomb revient piteusement en 1504 en Espagne.

La fin.
Aigri et frustré par tous les privilèges qu'il avait obtenu au départ et qui lui ont été un à un retirés, Colomb finit sa vie à Séville et mourut en 1506 à Valladolid, toujours persuadé d'avoir atteint les Indes, et certainement pas dans la pauvreté.

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Ferdinand Magellan
(1480? - Philippines 1520)
Navigateur et explorateur portugais

Origine et vie dans les Indes
Magellan fut issu d'une humble noblesse portugaise et orienté très jeune vers la carrière des armes. Il étudia aussi la navigation et travailla au département de la Marine à Lisbonne. Dès 1505, on peut le situer dans les Indes orientales. Probablement parti avec la flotte d'Almeida en tant qu'officier. Sous les ordres d'Alburquerque, Magellan participa au bombardement d'Ormuz et peut-etre aussi un peu auparavant à la bataille de Diu gagnée contre un flotte egypto-vénitienne. Après avoir fait un peu de commerce avec son propre argent, il décida de revenir au Portugal pour finir tranquillement ses vieux jours. Mais le navire s'échoua au passage du cap Bonne Espérance et coula avec toutes ses richesses. Magellan, sauf mais ruiné, fut ramené par un navire aux Indes. En 1511, il participa au bombardement de Mallaca, toujours sous les ordres d'Alburquerque. Les portugais avaient alors les moyens d'atteindre directement les fabuleuses îles aux épices. Un ami de Magellan, Serrao, s'y rendit avec difficultés, et de là transmit régulièrement à son ami des informations sur la navigation dans les îles. Magellan ne put le rejoindre. Il retourna au Portugal en 1513.

Retour au Portugal
Du Portugal, il partit guerroyer au Maroc. Une sombre histoire de corruption salit son nom. Il plaida plusieurs fois devant le roi Manuel sans succès. Après cet échec, il renia sa citoyenneté et partit à Séville (1517) offrir ses services à Charles I de Castille et d'Aragon (Charles Quint). Il se maria avec la fille de Diogo Barbosa, un transfuge du Portugal, comme lui, lassé de l'ingratitude du roi.

Rejoindre les îles aux épices par l'ouest
Ce fut vers cette période qu'il entendit parler de la découverte de Balboa et qu'il songea aussitôt que les îles aux épices de son ami Serrao ne devaient pas être très loin à l'ouest du continent américain, sous-estimant grandement ainsi la taille de l'océan Pacifique. Il avait de plus un argument politique en faveur de l'Espagne. Les îles, d'après ses calculs, se trouvaient du côté espagnol de la fameuse ligne de démarcation qu'il interprétait comme le méridien passant des deux côtées de la Terre (au milieu de l'Atlantique et de l'autre côté en Asie).

Préparation de l'expédition et départ
Le roi accepta l'idée d'un tel voyage vers l'ouest en 1518, mais les portugais, craignant pour leur monopole sur les épices, firent un barrage diplomatique qui retarda l'expédition. Finalement le 10 aôut 1519, 5 navires sous le commandement de Magellan quittèrent Séville. L'importance de l'expédition (prés de 300 hommes) n'était pas seulement due aux richesses en épices attendues, mais aussi à la résistance portugaise anticipée. Le Portugal envoya en effet deux flottes de navires intercepter Magellan. L'une au Brésil et l'autre au cap Bonne Espérance. Sans résultat.

L'Amérique du Sud
Magellan arriva au Brésil où il resta 13 jours. Il explora le Rio de La Plata (déjà visité par Diaz de Solis), une grande voie d'eau qui cachait peut-être un passage vers la mer de l'ouest, mais il se rendit compte que c'était un estuaire et hiverna un peu plus au Sud, en Patagonie. Là-bas, l'italien qui tenait le journal de bord le plus détaillé que nous avons de l'expédition, décrivit des hommes deux fois plus grands que les européens et courant si vite qu'ils ne pouvaient jamais les rattraper. Le mystère reste entier sur l'existence de tels hommes. Magellan était déterminé à tenter sa chance plus au sud pour trouver un passage. Ses hommes l'étaient moins. Une mutinerie de trois commandants dut être réprimée. Pendant la traversée du cap qui porte son nom, Magellan perdit deux navires. Un navire s'échoua, l'autre se mutina et rentra en Espagne.

Les premiers européens dans le Pacifique et mort de Magellan
Magellan fit alors route plein Nord, puis plein Ouest arrivé à l'equateur. L'équipage souffrit de malnutrition. L'océan était si calme pendant cette partie du voyage que Magellan l'appella le Pacifique. La flotte traversa tout le Pacifique et n'aperçut pas -hélas, pour les hommes malades- les îles polynésiennes. Ils aboutirent aux îles Mariannes puis aux Philippines. Magellan conclut des pactes d'alliance avec les chefs locaux et se lança dans un formidable et pacifque prosélytisme religieux. En voulant imposer la suzeraineté de son roi sur une île voisine, il mourut, préférant protéger de son corps la retraite de ses soldats.

Fin de l'expédition et retour à Séville
Le reste de l'expédition fuit les Philippines avec deux navires. Les marins du roi espagnol arrivèrent aux îles d'épices en novembre 1521. Ils vendirent tous ce qu'ils avaient en échange des précieux épices. Les deux navires repartirent lourdement chargés. Le plus abimé fut dirigé vers l'Est, les Amériques, où on espérait qu'il pourrait rejoindre Panama, et de là de l'Espagne. Mais les vents étaient contraires et en revenant vers les îles aux épices, il fut pris par les portugais. L'autre poursuivit sa route vers l'ouest en passant au large de toutes les îles tenues les portugais. La famine fit rage à bord. Le cap de Bonne Espérance fut difficilement passé. Les hommes n'en pouvaient plus et se ravitaillèrent sur une des îles portugaises du cap Vert. Ils se firent passer pour un navire des Amériques déporté par une tempête, mais le stratagème fut ébruité et les hommes à terre furent arrêtés. Le navire échappa de justesse et termina son voyage à Séville en septembre 1522.
Un huitième des hommes partis revint après trois ans de tour du monde. Beaucoup étaient morts de la faim ou de maladies. Certains furent prisonniers des portugais, d'autres moururent d'une morte violente. La vente des épices du seul navire revenu compensa largement les frais de départ des cinq navires.
À noter que le premier homme à faire le tour du monde fut en fait l'esclave de Magellan, Henrique, d'origine malaise. Lorsque l'expédition arriva près des îles Philippines, celui-ci reconnut son langage et fit office d'interprète. Il ne survécut pas longtemps, hélas, à son exploit. Il mourut victime d'un complot fomenté contre les espagnols.

bambi
Pedro Avares Cabral
(1467 - 1520)
Amiral portugais

En 1500, après le retour triomphal de Vasco de Gama, Cabral est chargé du commandement d'une flotte de 13 caravelles avec Bartolomeu Dias comme vice-amiral. Il suit les instructions de Vasco de Gama qui conseille de suivre une route au Sud-Ouest le plus loin possible (pour profiter des alizés) avant de se tourner plein Est pour franchir le cap Bonne Espérance et pénétrer dans l'océan indien (les vents d'ouest sont alors prédominants). Les instructions sont si bien suivies que la flotte se retrouve en Amérique du Sud, avant d'avoir atteint la latitude du cap Bonne Espérance. Cabral prend possession des terres au nom de la couronne du Portugal et nomme le pays Brésil au cause de sa richesse en bois. Il ne pouvait pas le savoir, mais Pinzon, un espagnol, avait découvert le Brésil un an avant lui.

Le voyage se poursuit vers les Indes avec un navire déjà perdu. 4 sont coulés dans le passage du cap (Dias meurt dans l'un d'eux) et le reste de la flotte est dispersé. C'est finalement avec 7 navires que Cabral approche des Indes.

Les Indes
Arrivé à Calicut, Cabral est attaqué par les marchands arabes qui comptent bien garder leur monopole. La flotte portugaise riposte et bombarde la ville pendant deux jours. Elle laisse cependant des prisonniers aux mains du roi local (Zamorin). Puis en Cochinchine et à Cannanore, les portugais rencontrent deux rois hindous amicaux qui promettent de ravitailler exclusivement les portugais en épices. Cabral laisse quelques hommes derrière lui et rentre au Portugal

 
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